On s'habitue à tout, même à la maltraitance. A l'indifférence à sa propre souffrance. On arrête de sourire. Le miroir renvoie un visage où les traits s'effondrent de désespoir. Avec parfois une ombre ou deux, meurtrissures banales. On s'habitue à tout. On a cherché toutes les solutions. On a envisagé toutes les portes de sortie. Mais le tunnel n'a pas de fin. A part peut-être la mort. L'échappée belle...
Au jour le jour, il y a l'autre. Celui qui prend plaisir à humilier, à traiter le soi-disant être "aimé" comme un objet, une boîte vide entre poussière et poubelle. Parfois on remplit la boîte de tous les reproches, de toutes les fautes qu'un "nous" imaginaire ne saurait assumer. Le plus drôle, c'est que tout ça n'a plus d'importance.
De temps à autre, il y a les autres. Ceux qu'on ne connaît pas. Et parfois le retour, un instant, à la vie. Un inconnu qui vous parle comme à un être humain. Sans mépris, sans méchanceté ou arrière-pensée. Une attention si surprenante que ce simple "bonjour, comment ça va ?"... Et quelle étrange question, quand autour de vous, tout votre monde s'en fout. Des petits riens, souffles d'existence, brins de guérison. Comme si l'humanité existait encore, lointain horizon, souvenir de ce qui aurait dû être...
A l'envie d'hurler "au secours", se sont substitués silence et regards fuyants. L'instinct de se cacher pour éviter d'afficher un mal-être devenu indissimulable. Un visage qui se mure, un coeur qui se terre, et des yeux qui toujours portent l'orage.
On s'habitue à tout, même à sa propre mort.